Kawasaki 1000R Eddie Lawson Replica 1984

Fermons les yeux.                            Daytona 1982, je pars en première ligne.  A ma droite Eddie Lawson sur la Kawa d'usine n°21, à ma gauche Freddie Spencer sur la Honda n°19.                                                                  "Gentlemen, start your engine ..."

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Au début des années 80, le marché américain demeure la priorité des constructeurs japonais.

Les quatre "grands" - Honda, Yamaha, Suzuki et Kawasaki - se livrent une concurrence commerciale soutenue sur le sol U.S.

Cette rivalité se prolonge en compétition, sur les circuits du championnat A.M.A. Superbike, où les meilleurs pilotes, américains pour la plupart, s'affrontent au guidon de machines dérivées de la série.

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Quatrième constructeur japonais arrivé sur la marché U.S., Kawasaki a connu une progression ininterrompue pendant plus de dix années.

Le record de ventes est atteint en 1977 avec 200 000 unités.

A la fin des années 70, la 900 Z1 arrive en fin de carrière.

Sa commercialisation remonte à 1972.

Les premières versions au réservoir en forme de goutte d’eau, aux quatre sorties d'échappements chromées, ont laissé place à des modèles aux lignes plus modernes : 1000 Z1R, 1000 MK2.

Déroutée, la clientèle U.S. n'a pas suivi.

Le "vieux" moteur 4 cylindres en ligne - 4 temps refroidi par air, à deux soupapes par cylindre - est dépassé par la concurrence (Honda en particulier) qui dispose de motorisations plus modernes et plus performantes :

- course courte

- quatre soupapes par cylindre

Kawasaki prépare la relève avec un nouveau moteur à 4 soupapes par cylindre et refroidissement liquide.

Mais ce nouveau modèle n’est pas prêt.

Il ne sortira qu’en 1984 : ce sera la GPZ900R Ninja.

En attendant, la marque d'Akashi fait patienter la clientèle avec la 1000J, aux formes rondouillardes, peu excitantes, bientôt suivie de la 1100 GPZ, dotée de l'injection électronique.

Sur le plan économique, la situation se tend pour les constructeurs nippons : le Yen japonais est en hausse constante, le Dollar en chute libre depuis 1976, ce qui entraîne une hausse sérieuse des tarifs des motos importées du Japon.

Les ventes stagnent.

Les stocks d'invendus s'accumulent.

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En compétition, Kawasaki connaît une période faste.

En 1980, son pilote officiel, le californien Eddie Lawson échoue de peu dans la conquête du titre Superbike AMA.

Lawson remporte le titre en 1981 - devant Freddie Spencer et sa Honda d’usine - en gagnant 4 des 8 courses de la saison.

Lawson récidive en 1982 - devant Mike Baldwin, sur Honda usine également - en remportant 5 des 11 épreuves du calendrier.

Le championnat Superbike AMA est très populaire en Amérique du Nord. 

Les machines ressemblent aux motos de série.

Les courses, toujours très disputées, donnent lieu à de véritables luttes entre pilotes : Lawson, Spencer, Cooley, Aldana, etc ... 

1982 marque pourtant la fin d’une époque : c’est la dernière saison des 1000cc. 

A partir de 1983, la cylindrée est limitée à 750cc.

Un changement de règlement auquel Honda U.S. n'est pas vraiment étranger : la moto de Spencer, dérivée de la 750 double arbre, n'a jamais pu rivaliser en puissance pure avec les Kawasaki et les Suzuki.

L'horizon se dégage pour Honda et son nouveau 750cc V4 à refroidissement liquide.

Peu enclin à miser sur un avenir sportif U.S. incertain, Kawasaki entend capitaliser à partir de ses succès acquis en compétition.

Et les transformer en succès commerciaux.

L’importateur américain tient aussi à écouler son stock de 1000J.

D'où l'idée soumise à l’usine de commercialiser une version "Replica" de la moto de course d’Eddie Lawson.

Pratique courante, à l'époque, en motoneige ou en automobile.

Pas encore en moto.

Ainsi naît la 1000R "Eddie Lawson Replica".

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La 1000R "Eddie Lawson Replica" reprend la partie-cycle de la 1000J, avec une valeur d’angle de chasse légèrement augmentée : 29° au lieu de 27,5° sur la 1000J.

Le châssis de la 1000R comprend en outre quelques détails qui permettent de le différencier d'un cadre de 1000J.

Le moteur est issu du modèle 1100GPZ.

Sur la 1000R il est alimenté par 4 carburateurs Mikuni à dépression, de 34 mm (injection électronique pour la 1100GPZ).

Le refroidissement est amélioré par l'ajout d’un échangeur air/huile positionné devant la culasse.

Ce moteur constitue l’une des dernières évolutions du "vieux" bloc 900 Z1 apparu en 1972.

Pour la 1000R, la cylindrée est portée à 998cc (côtes 69,4 x 66 mm, taux de compression 9,2 : 1)

La puissance maxi est de 102CH à 8 500 tr/mn.

La carrosserie provient de la 1100GPZ, avec phare rectangulaire et petit carénage tête de fourche – cet élément sera d’ailleurs systématiquement démonté en course, pour cause de turbulences.

Quelques accessoires sont spécifiques à la 1000R :

- tableau de bord type automobile "tout en un" (modèle européen)

- amortisseurs à bonbonne évoquant les combinés de la moto de course

- selle à deux niveaux, rappelant la selle surbaissée de la moto d'Eddie Lawson (de petite taille)

- guidon : la légende prétend qu’il fut dessiné par Mister Eddie himself

- échappement 4 en 1 Kerker noir mat : c’est la première fois qu’un constructeur japonais commercialise un modèle de série doté d’un échappement adaptable (Kerker est partenaire de l’écurie Kawasaki en Superbike).

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La vraie bonne idée est de reprendre la célèbre couleur verte, Lime Green, qui deviendra emblématique de la marque.

La 1000R Eddie Lawson Replica arrive dans les concessions U.S. en 1982.

Son prix de vente est laissé libre par K.M.C., importateur pour les U.S.A.

Conséquence : la 1000R est  proposée à un tarif bien trop élevé, dans la plupart des concessions.

La moto ne se vend pas.

Elle s’éternise dans les vitrines des marchands.

Ceux-ci proposent alors des rabais conséquents pour tenter d'écouler les quelques 750 exemplaires produits.

La 1000R Eddie Lawson Replica figure deux années au catalogue de la marque (modèle 1000 R1 et 1000 R2) avant d'être définitivement abandonnée.

En 1983, Eddie Lawson quitte la marque verte pour rejoindre Yamaha en Grand Prix : pour des raisons de droits, Kawasaki est contraint de rebaptiser la 1000 R2 "Superbike Champion".

Les derniers invendus sont envoyés en Europe.

On les retrouve jusqu'en 1985, dans une improbable livrée bleue métallisée : la cylindrée est portée à 1100cc, le cadre est directement emprunté à la 1000J.

Leur diffusion restera confidentielle.

Initialement produite en 1982 et 1983, la 1000R Eddie Lawson Replica suscite l'intérêt des collectionneurs à partir des années 2000.

Compte tenu du faible nombre d’exemplaires, la 1000R est rare et recherchée, principalement dans sa livrée "Lime Green" - la moto existe également en blanc.

L’exemplaire présenté est un modèle 1000 R2 fabriqué en 1983, immatriculé pour la 1ère fois en France en 1984.

Il a été restauré en atelier spécialisé.

S’éloignant de l’origine, cette 1000R évoque l’esprit de la machine de course de l’époque.

Elle reste toutefois pleinement utilisable sur route.

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La partie-cycle a été entièrement restaurée.

Le châssis a été passé au marbre.

Les pièces métalliques ont été sablées, apprêtées et mises en peinture époxy : finition noir brillant.

Les roues ont été microbillées et repeintes en coloris "or".

Le bord des jantes et des branches a été poli.

Les roulements de roues, de direction et de bras oscillant sont neufs. 

Les pneumatiques sont des Bridgestone BT45. 

Les disques de freins ont été rectifiés.

La moto comporte quelques spécificités :

- bras oscillant triangulé en alu, importé du Japon

- combinés amortisseurs à doubles ressorts "à la manière" de la moto d'usine

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Pièce maîtresse de cette "Muscle Bike", le moteur a fait l’objet d’une préparation spéciale :

- pistons 1170cc

- vilebrequin équilibré et soudé

- culasse à double allumage

- grosses soupapes (à ressorts renforcés)

- conduits d’échappement polis

- arbres à cames Andrews (stage 2)

- embrayage renforcé

- boîte de vitesses à pignons retaillés "en queue d’aronde"

Le refroidissement est amélioré par la présence d'un échangeur air/huile de gros volume.

Dans cette configuration, le bloc délivre 120 CH à 10 200 tr/mn (taux de compression 11:1).

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Les carburateurs demeurent d'origine et équipés de filtres à air individuels de marque K&N.

Les pipes d'admission sont neuves.

La carrosserie a été repeinte aux couleurs de la 1000 R2 de 1983.

La finition comporte 8 couches de vernis.

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Les clignotants ont été supprimés.

Le garde-boue AR a été raccourci.

Les durits de freins AV sont en inox tressé, de type aviation.

Référence à la moto d’époque : l’échappement 4 en 1 KERKER noir mat importé des U.S.

Le Kerker était monté en série sur les 1000R américaines, mais n’était pas homologué en France.

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